La rupture conventionnelle du salarié protégé : comment ça marche ?
Est-ce possible de faire une rupture conventionnelle d’un CDD ?
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
Parmi les différentes façons de rompre un CDD avant son terme, il existe la rupture amiable qui ne doit pas être confondue avec la rupture conventionnelle d’un CDI.
Si vous souhaitez réaliser une rupture conventionnelle de CDD, il vous faut en réalité suivre la procédure de rupture amiable de CDD. Suivez ce guide afin d’avoir toutes les clés en main pour aborder sereinement son déroulement.
Pour vous aider, nous avons répertorié les principales questions que soulève cette rupture du CDD à l’amiable qui pourrait s’apparenter à une rupture conventionnelle de CDD.
Mini-Sommaire
Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?
La rupture conventionnelle introduite en 2008 en France a permis aux employeurs et aux salariés de bénéficier d’un nouveau mode de rupture du contrat de travail, leur permettant de décider conjointement des conditions de cette rupture.
La rupture conventionnelle est une procédure fondée sur un accord du salarié et de l’employeur. Ainsi, une rupture conventionnelle est une procédure qui permet de rompre un contrat à durée indéterminée à l’amiable.
La rupture conventionnelle ne peut être imposée par aucune des parties et est indépendante de la démission ou du licenciement.
Cette rupture obéit à une procédure spécifique, soumise aux dispositions légales, pour garantir la liberté de consentement des parties : entretien entre les parties, homologation de la convention et droit à une indemnité spécifique de rupture conventionnelle du contrat de travail pour le salarié.
Rupture conventionnelle d’un CDD : est-ce possible ?
La rupture conventionnelle n’est autorisée que si le salarié et l'employeur sont liés par un CDI. Elle est exclue en cas de CDD.
En effet, la loi ne prévoit pas le recours à la rupture conventionnelle pour un CDD. Les salariés et employeurs, liés par un CDD, doivent donc trouver des alternatives pour rompre le contrat prématurément. La rupture anticipée du CDD à l’amiable est la procédure qui se rapproche le plus de la rupture conventionnelle.
Quelles sont les alternatives à la rupture conventionnelle en CDD ?
La rupture conventionnelle en CDD n’étant pas possible, des alternatives existent pour rompre un contrat de travail à durée déterminée :
- la rupture anticipée du CDD à l’amiable ;
- la rupture du CDD pendant la période d’essai ;
- la rupture du CDD pour embauche en CDI ;
- le licenciement.
La rupture anticipée du CDD à l’amiable
Si votre salarié est titulaire d’un CDD, vous pouvez lui proposer une rupture de CDD d’un commun accord. Cette procédure permet de rompre le contrat de travail à durée déterminée de manière anticipée.
Si dans le langage courant on parle de rupture conventionnelle de CDD, le terme exact est "rupture anticipée du CDD à l’amiable".
🛠️ En pratique : le salarié et l'employeur peuvent s'accorder pour mettre fin au CDD avant l’arrivée de son terme.
La procédure de la rupture amiable du CDD
La demande de rupture anticipée du CDD à l’amiable peut se faire par l’envoi d’une lettre de demande de rupture anticipée du CDD adressée par lettre recommandée avec accusé de réception.
Dans un second temps, l’employeur et le salarié peuvent prévoir un entretien pour discuter des conditions de la rupture du CDD.
La rupture anticipée par accord des parties doit obligatoirement s’appuyer sur un écrit signé par les deux parties, et dont les termes devront être aussi précis que possible, en prévoyant notamment :
- la date de fin du CDD ;
- les conditions financières applicables à la rupture (versement de la prime de précarité).
☝️ Bon à savoir : le document formalisant l’accord des parties de rompre le CDD à l’amiable ne fait pas l’objet d’une homologation comme dans le cadre d’une rupture conventionnelle.
Comme pour la rupture conventionnelle, le consentement de l'employeur et du salarié de mettre fin au contrat de travail avant son terme doivent être clairs et non équivoques. La rupture à l’amiable du CDD ne peut en effet pas résulter d’un simple reçu pour solde de tout compte par exemple.
La procédure de rupture amiable du CDD ne prévoit pas de préavis ou de délais incompressibles, comme c’est le cas pour la rupture conventionnelle d’un CDI. Les parties peuvent convenir ensemble que la rupture prendra effet dès la signature de l’accord amiable de rupture, ou prévoir une date ultérieure à laquelle la rupture commencera à prendre effet.
La rupture amiable du CDD ne doit pas être conclue pour régler un litige
La rupture du CDD d’un commun accord a pour seul objet de mettre fin aux relations contractuelles entre l’employeur et le salarié, et non de régler un litige entre les parties.
En effet, elle ne constitue pas une transaction (souvent conclue suite à un litige entre le salarié et l’employeur, ou suite à un licenciement) destinée à éviter par des concessions réciproques toute contestation née ou à naître résultant de la rupture définitive du contrat de travail.
Ainsi en cas de rupture à l’amiable d’un CDD, l’accord signé ne pourra pas priver le salarié de ses droits nés de l’exécution du contrat de travail ou de sa possibilité d’engager éventuellement une action contre son employeur.
La rupture du CDD pendant la période d’essai
Un contrat à durée déterminée peut être rompu à tout moment pendant la période d’essai. Cette rupture du CDD peut être à l’initiative du salarié ou de l’employeur.
Aucun formalisme particulier n’est à respecter, sauf si la convention collective ou le contrat de travail en prévoit. Il est cependant conseillé de formaliser la rupture de la période d’essai du CDD par un écrit envoyé en lettre recommandée avec accusé de réception, ou remis en main propre.
Un délai de prévenance doit être respecté pour la rupture de la période d’essai d’un CDD :
- si la rupture est à l’initiative du salarié, le délai est de 24 heures pour une présence inférieure à 8 jours et de 48 heures au-delà ;
- si la rupture est à l’initiative de l'employeur, le délai de prévenance est de 24 heures pour une présence inférieure à 8 jours, 48 heures entre 8 jours et un mois de présence, 2 semaines après un mois de présence et 1 mois après 3 mois de présence du salarié.
☝️ Bon à savoir : si le salarié en CDD est un salarié protégé, l’employeur doit obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail pour rompre la période d’essai.
L’employeur doit également être vigilant, puisque la rupture du CDD pendant la période d’essai n’est pas possible en cas d’arrêt pour maladie ou accident professionnel du salarié, le contrat étant de fait suspendu.
La rupture de la période du CDD est également impossible pour un motif disciplinaire. Dans ce cas, l’employeur est tenu d’engager une procédure de licenciement.
📝 À noter : un CDD dont la rupture d’essai a été rompue n’ouvre pas droit au versement de la prime de précarité. Seule l’indemnité compensatrice de congés payés est due.
La rupture du CDD par le salarié pour conclusion d’un CDI
La rupture anticipée du CDD à l'initiative du salarié ne peut se faire par une démission. En effet, la démission est un mode de rupture réservé exclusivement au salarié en CDI.
Ainsi, un salarié en CDD ne peut pas démissionner. Toutefois, ce dernier peut demander la rupture anticipée de son contrat de travail s’il justifie d’une embauche en CDI.
Pour ce faire, le salarié peut envoyer un écrit à son employeur et fournir une preuve d'embauche en CDI, comme une promesse d’embauche par exemple.
☝️ Bon à savoir : le salarié doit respecter un préavis dont la durée est égale à un jour par semaine travaillée si le CDD est à terme imprécis, ou d’un jour par semaine calculé sur la durée totale du CDD à terme précis, sans pouvoir dépasser 2 semaines.
Le licenciement d’un salarié en CDD
Comme pour un CDI, le contrat à durée déterminée peut être rompu par une procédure de licenciement en cas de :
- faute grave ;
- faute lourde ;
- inaptitude au travail constatée par le médecin du travail ;
- force majeure.
⚠️ Attention : le licenciement économique d’un salarié en CDD n’est pas possible. Si un employeur rompt le CDD de façon anticipée au cours d’un licenciement économique, la rupture peut être considérée comme abusive.
Les procédures propres à chaque licenciement doivent être respectées pour rompre le CDD. Concernant la prime de précarité, elle n’est pas versée en cas de faute grave, lourde ou dans le cadre de la force majeure.
☝️ Bon à savoir : une faute grave qui intervient après le renouvellement du CDD ne remet pas en cause le versement de la prime de précarité sur la durée initiale du contrat.
Quelles sont les conséquences de la rupture anticipée d’un CDD à l’amiable ?
La rupture amiable d’un CDD permet au salarié de continuer à bénéficier de certains droits, contrairement à d’autres modes de rupture :
- un préavis facultatif ;
- le versement d’une prime de précarité ;
- l’indemnité chômage.
Comme dans toute rupture du contrat de travail, l’employeur doit fournir certains documents au salarié : le certificat de travail, l’attestation Pôle emploi et le reçu pour solde de tout compte.
La fin du contrat de travail en CDD et le préavis
La loi ne prévoit pas de préavis pour la rupture anticipée d’un CDD à l’amiable. En effet, la résiliation du contrat est effective dès la conclusion de l’accord entre le salarié et l’employeur.
Cependant, l’écrit co-signé par les parties pour entériner la rupture amiable du CDD peut prévoir une date de fin de contrat ultérieure. S’il ne s’agit pas à proprement parler de préavis, cela laisse une possibilité à l’employeur et au salarié de poursuivre pendant un temps l'exécution du contrat, avant la remise du solde de tout compte. En effet, cette date est librement définie par les parties.
La prime de précarité
À la fin du CDD rompu de manière anticipée de façon amiable, le salarié a le droit au versement de la prime de précarité. Cette indemnité de fin de contrat est égale à 10 % de sa rémunération brute totale versée au cours de son contrat (sauf conventions ou accords collectifs contraires).
📝 À noter : cette prime de précarité ne peut pas être supprimée en cas de rupture amiable même si le salarié y a renoncé dans l’accord signé de rupture à l’amiable.
Le versement de la prime de précarité se fait au moment du paiement du dernier salaire, et figure distinctement sur le bulletin de salaire.
☝️ Bon à savoir : dans le cadre d’une rupture anticipée d’un CDD, le salarié conserve également le bénéfice de son indemnité compensatrice de congés payés pour les jours de congés acquis, mais non pris au moment de la rupture de son contrat de travail.
Les droits au chômage
La rupture du CDD à l'initiative du salarié dans le cadre d’un accord amiable ouvre droit aux indemnités de chômage. En effet, puisque cette rupture de contrat s’apparente à ce qu’on pourrait appeler une "rupture conventionnelle de CD"», les droits au chômage sont ouverts à l’issue du contrat (si le salarié remplit les conditions pour être demandeur d’emploi).
Quelles indemnités de rupture en CDD en l’absence de rupture conventionnelle ?
En fonction du mode de rupture anticipée du CDD, le versement de la prime de précarité n’est pas toujours établi. Voici un tableau récapitulatif.
En dehors de la prime de précarité et du versement des congés payés acquis et non pris, le salarié en CDD ne bénéficie pas d’autres indemnités de rupture du contrat.
Mode de rupture du CDD |
Versement de la prime de précarité |
Rupture anticipée du CDD à l’amiable |
Oui |
Rupture du CDD pendant la période d’essai |
Non |
Rupture du CDD à l'initiative du salarié pour conclusion d’un CDI |
Non |
Licenciement du salarié en CDD pour faute grave ou lourde |
Non |
Rupture du CDD pour cas de force majeure |
Non |
⚠️ Attention : si la rupture anticipée du CDD est considérée comme abusive, l’employeur peut être contraint de verser au salarié des dommages et intérêts.
Vous souhaitez en savoir plus sur les modes de rupture d’un CDD ? N’hésitez pas à consulter notre article dédié à la rupture d'un CDD.
FAQ
Comment quitter un CDD sans perdre ses droits au chômage ?
Pour percevoir des droits au chômage, le salarié doit être involontairement privé d’emploi. Ainsi, seuls les cas de rupture à l'initiative de l’employeur ouvrent droit aux indemnités de chômage (licenciement ou rupture de la période d’essai).
Il existe cependant une exception puisque la rupture anticipée du CDD à l’amiable ouvre droit au chômage.
Quelles sont les étapes d’une rupture conventionnelle ?
Le déroulement d’une rupture conventionnelle est le suivant :
- demande de rupture conventionnelle formulée par l’une ou l’autre des parties ;
- entretien ;
- demande d’homologation ;
- rupture du contrat de travail en cas d’homologation.
Qui peut bénéficier d’une rupture conventionnelle ?
La rupture conventionnelle est un mode de rupture du contrat de travail réservé exclusivement aux salariés en CDI ou aux salariés du particulier employeur. Les salariés en CDD sont exclus du dispositif.
Principales sources législatives et réglementaires :
- Articles L1243-1 à L1243-13-1 - Code du travail
Note du document :
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Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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