Rupture conventionnelle et chômage : quelles sont les règles ? (2024)
Est-il possible de bénéficier du chômage après un licenciement pour faute grave ?
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
Le licenciement pour faute grave est un licenciement pour motif disciplinaire. Par conséquent, il est opportun de s’interroger sur les conséquences d’un tel licenciement, notamment sur les allocations chômage du salarié licencié pour faute. Alors, licenciement pour faute grave et chômage sont-ils compatibles ? Quelles sont les conditions à respecter pour toucher le chômage suite à un licenciement pour faute grave ? Explications.
Mini-Sommaire
Qu’est-ce qu’un licenciement pour faute grave ?
Avant de voir les conséquences du licenciement pour faute grave sur les droits au chômage du salarié, voyons en quoi consiste ce type de licenciement et ce qui le distingue des autres licenciements pour faute.
Licenciement pour faute grave : définition
Un employeur peut licencier un salarié pour faute grave si deux conditions sont réunies :
- la présence d’un agissement contraire aux obligations du salarié envers son employeur ;
- un agissement d’une importance telle que le maintien du salarié au sein de l’entreprise est impossible, y compris pour la durée du préavis.
Ces critères étant soumis à interprétation, chaque cas est étudié à la lumière des circonstances et faits rapportés.
☝️ Bon à savoir : la qualification de faute grave peut être retenue même s’il s’agit de la première faute commise par le salarié.
À titre indicatif, voici quelques exemples de fautes graves pouvant être commises par le salarié :
- un état d’ivresse pendant les heures de travail ;
- des absences injustifiées ;
- le refus d’exécuter une tâche prévue au contrat de travail (insubordination) ;
- vol dans l’entreprise.
L’employeur qui constate une faute grave de son salarié, doit suivre la procédure relative au licenciement pour motif personnel.
📝 À noter : suite à un licenciement pour faute grave, le salarié ne perçoit pas d’indemnité de licenciement.
Les différents types de licenciement pour faute
Le licenciement pour faute grave n’est pas le seul licenciement possible en cas de faute commise par le salarié. En effet, cela va dépendre du degré de gravité de la faute en question.
Ainsi, le licenciement pour faute simple peut être retenu lorsque les conditions suivantes sont réunies :
- la présence d’un agissement contraire aux obligations du salarié envers son employeur ;
- l’agissement n’est pas suffisamment grave pour nécessiter la rupture immédiate du contrat de travail. Il est possible d’exécuter le préavis.
📝 À noter : dans le cadre d’un licenciement pour faute simple, le salarié perçoit une indemnité de licenciement. Il peut également bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).
À l’extrême inverse, l’employeur peut licencier un salarié pour faute lourde. Ici aussi, deux conditions sont requises :
- le salarié a commis une faute d’une particulière gravité avec l’intention de nuire à l’employeur ;
- la gravité de sa faute est tellement grave, que le maintien du salarié dans l’entreprise est rendue impossible même pendant la durée du préavis.
La faute lourde peut être retenue en cas de dégradation volontaire d’un outil appartenant à l’entreprise, de violence physique ou de menace de mort à l’encontre de l’employeur ou encore en cas de divulgation d’informations confidentielles.
De plus, si la faute commise par le salarié licencié pour faute lourde a entraîné un préjudice pour l’employeur, le salarié peut être condamné à lui verser des dommages-intérêts.
Enfin, dans le cadre d’un licenciement pour faute lourde, le salarié ne perçoit pas d’indemnité de licenciement. Cependant, il peut bénéficier de l’ARE s’il remplit les conditions d’octroi.
Pour résumer les différents types de licenciement pour faute et leurs conséquences, voici un tableau récapitulatif :
Type de licenciement pour faute |
Conditions |
Indemnité de licenciement |
Droit au chômage * |
Licenciement pour faute simple |
Un agissement contraire aux obligations du salarié envers son employeur + Maintien possible dans l’entreprise le temps du préavis |
Oui |
Oui |
Licenciement pour faute grave |
Un agissement contraire aux obligations du salarié envers son employeur + Maintien dans l’entreprise impossible le temps du préavis |
Non |
Oui |
Licenciement pour faute lourde |
Une faute d’une particulière gravité + Intention de nuire à l’employeur + Maintien dans l’entreprise impossible le temps du préavis |
Non |
Oui |
* sous réserve que les conditions d’octroi soient respectées.
Quelles sont les conséquences d’un licenciement pour faute grave ?
Le licenciement pour faute grave entraîne la rupture immédiate du contrat de travail qui lie le salarié à l’employeur. Par conséquent, le salarié n’exécute pas son préavis.
En effet, c’est l’une des conditions requises pour retenir la faute grave : l’agissement est d’une telle gravité que le maintien dans l’entreprise est rendu impossible, même pour la période de préavis.
D’ailleurs, aucune indemnité compensatrice de préavis n’est prévue dans ce cas.
Puisqu’il s’agit d’une faute grave, même si le salarié n’avait pas l’intention de nuire à l’employeur, il ne peut pas percevoir une indemnité de licenciement.
Par conséquent, pour l’employeur, le licenciement pour faute grave n’occasionne pas de frais spécifiques, en dehors du solde de tout compte. Cela signifie notamment, qu’en cas de licenciement pour faute grave, le solde de tout compte comprend :
- le salaire mensuel au prorata temporis de la présence du salarié dans l’entreprise ;
- l’indemnité compensatrice de congés payés.
Licenciement pour faute grave et chômage : est-compatible ?
Reste alors à savoir si, suite à un licenciement pour faute grave, le salarié peut percevoir des allocations chômage.
La réponse est oui. En effet, dès lors que le salarié licencié pour faute grave réunit bien les conditions d’octroi de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, il peut en bénéficier.
On en conclut donc que licenciement pour faute grave et chômage sont compatibles.
Sous quelles conditions peut-on toucher le chômage après un licenciement pour faute grave ?
Pour percevoir le chômage suite à un licenciement pour faute, le salarié remercié doit réunir un certain nombre de critères d’éligibilité, et être inscrit à Pôle Emploi.
📝 À noter : depuis le 1er janvier 2024, France Travail remplace Pôle emploi. Ce nouvel organisme bénéficie de missions étendues ainsi que d'un accompagnement amélioré pour les chercheurs d'emploi. Vous devez donc vous inscrire à France Travail.
Les conditions d’éligibilité au chômage après un licenciement pour faute grave
Suite à un licenciement pour faute, le chômage est accessible aux mêmes conditions que pour toute personne sans emploi.
Ainsi, la première condition à respecter est la privation involontaire d’emploi. La réglementation relative à l’assurance-chômage considère que tous les types de licenciement relèvent d’une privation involontaire d’emploi. Cela s’explique par le fait que dans tous les cas, c’est l’employeur qui est à l’initiative de la fin du contrat de travail.
En outre, pour pouvoir prétendre à l’ARE, le salarié doit être physiquement apte à exercer un emploi. Il doit également résider en France.
Par ailleurs, le salarié licencié pour faute grave doit avoir effectué au moins 6 mois de travail au cours des 12 derniers mois. En effet, il doit satisfaire à la condition d’affiliation minimum au régime social des salariés.
D’autres conditions d'éligibilité sont également requises pour percevoir l’ARE :
- avoir travaillé au moins 6 mois au cours des deux dernières années ou au cours des 3 dernières années si le demandeur a plus de 53 ans ;
- être en recherche active d’emploi ;
- ne pas avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite.
Être inscrit à Pôle Emploi
En plus des conditions d'éligibilité au chômage liées à la personne du demandeur d’emploi, il doit également respecter l’obligation d’être inscrit à Pôle Emploi.
L’inscription à Pôle Emploi doit intervenir dans les 12 mois suivants la fin du contrat de travail.
De plus, le demandeur d’emploi doit actualiser sa situation chaque mois auprès de Pôle Emploi pour continuer de percevoir ses allocations chômage.
☝️ Bon à savoir : suite à un licenciement pour faute grave, pour le chômage, un délai de carence de 7 jours minimum est appliqué. Toutefois, ce délai peut être plus long dès lors que le salarié perçoit une indemnité compensatrice de congés payés par exemple.
Quel est le montant des allocations-chômage après un licenciement pour faute grave ?
Concernant le licenciement pour faute grave, le chômage en 2024 est le même que pour les autres demandeurs d’emploi éligibles à l’ARE. Il n’est pas pénalisé au titre de l’ARE du fait de la faute commise dans son dernier emploi.
Ainsi, le calcul de l’ARE se fait sur la base du salaire journalier de référence (SJR), c’est-à-dire la moyenne des salaires bruts et des primes perçus par le salarié licencié au cours des 12 derniers mois.
📝 À noter : il existe un montant minimum d’allocation journalière qui est de 31,59 € depuis le 31 juillet 2023.
Ensuite, le calcul se fait comme suit :
Montant brut des allocations chômage = 12,95 € de part fixe + 40,4 % du SJR
⚠️ Attention : les allocations chômage sont soumises aux cotisations sociales telles que la CSG, la CRDS et la complémentaire retraite. Le montant net des allocations chômage est donc inférieur au montant brut.
Quelle est la durée des droits au chômage après un licenciement pour faute grave ?
Puisque suite à un licenciement pour faute grave, le chômage suit les mêmes règles que pour toute personne privée involontairement de son emploi, la durée des allocations chômage est, elle aussi, identique.
Ainsi, en principe, la durée maximale des droits au chômage après un licenciement pour faute grave est de :
- 24 mois, si vous avez moins de 53 ans ;
- 30 mois, si vous avez 53 ou 54 ans au moment de la rupture du contrat de travail ;
- 36 mois, si vous avez 55 ans ou plus au moment de la rupture du contrat de travail.
Cependant, le versement des allocations chômage peut être interrompu avant ce délai, si vous vous trouvez dans l’un des cas suivants :
- vous ne résidez plus en France ;
- vous percevez votre retraite à taux plein ;
- vous avez trouvé un nouvel emploi ;
- vous optez pour l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (ARCE) ;
- vous bénéficier de l’indemnité journalière de la sécurité sociale ;
- vous décidez de vous engager dans le service civique ;
- vous avez fait de fausses déclarations lors de la demande de l’ARE ;
- vous ne suivez pas les formations de reclassement offertes par France Travail ;
- vous ne recherchez pas activement un autre emploi, ou vous avez rejeté à plusieurs reprises des offres raisonnables d’emploi ;
- vous n’avez pas actualisé votre situation chaque mois.
FAQ
Quel licenciement ne donne pas droit au chômage ?
Tous les licenciements donnent droit au chômage. Cela comprend aussi bien le licenciement pour motif personnel, le licenciement pour faute et ce, quelle que soit la gravité de la faute, et le licenciement économique.
Quels sont mes droits si je suis licencié pour faute grave ?
Le salarié licencié pour faute grave peut saisir le Conseil des prud’hommes s’il estime que la gravité de la faute n’est pas suffisante pour justifier son exclusion immédiate de l’entreprise. Il peut notamment demander une requalification en licenciement pour faute simple, afin de percevoir l’indemnité de licenciement. De plus, en cas de licenciement abusif, l’employeur peut être condamné à payer des dommages-intérêts à son ancien salarié.
Qui doit prouver la faute grave ?
C’est à l’employeur de prouver l’existence d’une faute grave justifiant le licenciement du salarié. Il doit notamment démontrer en quoi le salarié a commis un acte allant à l’encontre de ses obligations envers l’employeur, mais aussi expliquer en quoi cette faute rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, y compris pendant la période de préavis.
Principale source législative et réglementaire :
- article L.1232-1 - Code du travail
Note du document :
4,5 - 103 vote(s)
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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