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Prêt de main-d’œuvre illicite : comment l'éviter ?

Léna Cazenave - Image

Léna Cazenave

Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille. 


Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.

Le prêt de main-d'œuvre est devenu une pratique de plus en plus recherchée par les entreprises. Un certain nombre de sociétés cherchent en effet à se procurer des compétences extérieures, qui n'existent pas en interne, pour réaliser des missions nécessitant une technicité particulière. Seulement, le prêt de main-d'œuvre est un délit, exception faite de quelques situations prévues par la loi.

Prêt de main-d'œuvre illicite : définition, situations dans lesquelles la loi autorise cette pratique et sanctions prévues. Legalstart vous répond pour que vous ne preniez aucun risque.

Mini-Sommaire

En quoi consiste le prêt de main-d'œuvre ?

Le prêt de main-d’œuvre est un dispositif qui permet à un employeur (l’entreprise prêteuse) de mettre des salariés de son entreprise à disposition d’une autre entreprise (l’entreprise utilisatrice), pour un temps déterminé.

Le prêt de main-d'œuvre ne doit pas être à but lucratif. Cela signifie que l’entreprise prêteuse ne doit tirer aucun bénéfice de cette opération. Elle doit facturer uniquement à l’entreprise utilisatrice :

  • les salaires versés au salarié prêté ;
  • les charges sociales issues de ces salaires ;
  • les éventuels frais professionnels remboursés au salarié.

❓ Question fréquente : prêt de main-d'œuvre et sous-traitance, est-ce la même chose ? Non, le contrat de sous-traitance a pour objet la réalisation d’une activité au sein d’un contrat commercial, et non la fourniture d’une main-d'œuvre. L’objet du contrat est en effet une tâche définie et identifiable distincte de l’entreprise donneuse d’ordres.

Quels sont les cas autorisés de prêt de main-d'œuvre ?

Le prêt de main-d’œuvre doit en principe être à but non lucratif. La loi prévoit toutefois des exceptions.

Les exceptions prévues par la loi

La loi énonce que le prêt de main-d'œuvre doit obligatoirement être à but non lucratif pour l’entreprise prêteuse afin d’être licite. Cette dernière doit en effet uniquement facturer les salaires versés à ses salariés ainsi que les charges sociales et frais professionnels qui y sont liés à l’entreprise utilisatrice. L’entreprise prêteuse ne peut pas faire de marge sur le prêt de main-d'œuvre.

Néanmoins, la loi prévoit également des activités pour lesquelles le prêt de main-d'œuvre est licite, même si le but du contrat est financier. Les entreprises qui sont autorisées à pratiquer le prêt de main-d’œuvre à but lucratif sont :

  • les entreprises de travail temporaire (par les agences d’intérim avec le contrat d’intérim) ;
  • les agences de mannequins, dont les titulaires disposent d’une licence ;
  • les associations ou sociétés sportives qui mettent des sportifs à la disposition de la fédération sportive délégataire en tant que membre d'une équipe de France ;
  • les entreprises de travail à temps partagé ;
  • la mise à disposition de salariés auprès d’un syndicat.

Le prêt de main-d’œuvre à une jeune entreprise, une PME ou une structure d’intérêt général ou d’utilité publique

Une grande entreprise employant au moins 5.000 salariés, ou appartenant à un groupe comptant au moins 5.000 salariés, peut mettre ses salariés à disposition d’une entreprise utilisatrice. Cela est licite si l'opération permet de :

  • contribuer à l’amélioration des compétences de la main-d’œuvre de l’entreprise utilisatrice ;
  • favoriser les transitions professionnelles ;
  • établir un partenariat d’affaires ou d’intérêt commun.

L’entreprise utilisatrice doit remplir au moins une des conditions suivantes :

  • être une structure reconnue d’intérêt général ou d’utilité publique, donnant droit aux avantages fiscaux liés au mécénat d’entreprise ;
  • avoir été créée depuis moins de 8 ans ;
  • être une PME (moins de 250 salariés).

☝️ Bon à savoir : la condition d’effectif de 5.000 salariés ne s’applique pas si le prêt concerne une structure d’intérêt général ou d’utilité publique.

La durée de ce prêt est limitée à un maximum de 3 ans. L’entreprise prêteuse peut facturer à l’entreprise utilisatrice un montant inférieur au coût réellement supporté quant aux salaires, charges, etc.

⚠️ Attention : il n’est pas possible d’utiliser ce dispositif de mise à disposition dans le cadre d’un prêt de main-d'œuvre entre sociétés du même groupe.

Le contrat de mise à disposition

Pour que le prêt de main-d'œuvre soit licite, l'accord du salarié concerné doit être donné au préalable. Cet accord est formalisé par écrit dans un avenant au contrat et doit comporter plusieurs éléments :

  • les missions confiées au salarié ;
  • la description des missions confiées au salarié (les missions doivent être nettement définies dans l’avenant) ;
  • les horaires de travail du salarié ;
  • le lieu de travail ;
  • une possible période probatoire peut être prévue avec l’accord du salarié.

📝 À noter : l’arrêt de cette période probatoire par le salarié ou par l’entreprise utilisatrice ne peut pas faire l’objet d’une sanction ou d'un licenciement pour le salarié.

Un contrat de mise à disposition doit également être signé entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice. Ce contrat doit également comporter plusieurs éléments :

  • la durée de la mise à disposition ;
  • l’identité et la qualité du salarié ;
  • le mode de rémunération des salaires, des charges sociales et des frais professionnels (le mode de rémunération adéquat est généralement le forfait journalier).

Les employeurs de l’entreprise prêteuse et utilisatrice doivent consulter le CSE (le comité social et économique) et les avertir des conventions qui ont été signées.

☝️ Bon à savoir : lorsque vous avez besoin de compétences externes de manière ponctuelle et que vous ne souhaitez pas embaucher de nouveaux salariés, il est également possible de conclure un contrat de freelance.

Le statut du salarié mis à disposition

C’est l’entreprise utilisatrice qui est responsable des conditions de travail du salarié pendant la durée de la mission durant laquelle le salarié est mis à disposition.

📝 À noter : pendant toute la période du prêt, le contrat de travail qui lie le salarié à l’entreprise prêteuse n’est ni suspendu ni rompu.

Le salarié a accès aux installations et aux matériels dont bénéficient les salariés de l'entreprise utilisatrice. Il continue également de bénéficier des dispositions conventionnelles de son entreprise d’origine.

À la fin de la mission, le salarié retrouve son poste de travail d’origine dans l’entreprise prêteuse. L’évolution de sa carrière et sa rémunération ne peuvent en aucun cas être affectées par la qualité de son travail au sein de l'entreprise utilisatrice et du déroulement de la mission qu’il a effectuée.

☝️ Bon à savoir : le salarié qui refuse la mission ne peut pas être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour son refus.

Qu’est-ce qu’un prêt de main-d'œuvre illicite ?

Un prêt de main-d'œuvre illicite, par définition, est une situation dans laquelle un employeur va payer pour bénéficier du travail des salariés d’un autre employeur. La loi prévoit deux infractions liées à la fourniture de main-d'œuvre : le délit de main-d'œuvre illicite et le délit de marchandage.

Le prêt de main-d'œuvre illicite et le Code du travail ? C’est l’article L-8241-1 du Code du travail qui énonce que "toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d'œuvre est interdite".

Ainsi, constitue un prêt de main-d'œuvre illicite, par exemple, le fait qu’une entreprise prête des salariés à une autre entreprise, mais facture ce service avec une marge bénéficiaire. Donc au-delà des coûts des salaires, des charges sociales et des frais professionnels. Il en est de même si l’entreprise prêteuse ne facture pas à l’entreprise utilisatrice l’intégralité des frais. Cela constitue un but lucratif.

Le délit de marchandage se distingue du prêt de main-d'œuvre illicite par le fait que le salarié subit un préjudice lors de cette mise à disposition : il y a une violation des droits du salarié. Il peut s’agir d’une perte de salaire, d’une inégalité ou d’une perte d’avantages, etc.

Quels sont les critères pour déterminer s’il y a prêt de main-d'œuvre illicite ou non ?

Le prêt de main-d’œuvre est considéré comme illicite lorsque trois critères cumulatifs sont présents :

  • Il y a un prêt de main-d’œuvre de salariés.
  • Le contrat porte uniquement sur le prêt de main-d'œuvre. Il s’agit de l’objet exclusif du contrat.
  • Le but du contrat est financier. Le prêt de main-d'œuvre fait l’objet d’une contrepartie financière.

Afin d’identifier le délit de prêt de main-d’œuvre, le juge se penche sur plusieurs indices. Il regarde :

  • L’objet du contrat. Le juge vérifie la nature de la tâche à accomplir. Si l’entreprise utilisatrice dispose des moyens en interne de l’accomplir, le prêt de main-d'œuvre illicite est fondé.
  • L’origine de la fourniture du matériel de travail. L'utilisation d’un matériel propre à l’entreprise prêteuse est un indice d’un prêt de main-d'œuvre illicite.
  • L’identification du pouvoir de direction. Le transfert du lien de subordination de l’employeur prêteur à l’employeur utilisateur est un indice d’un prêt de main-d’œuvre illicite.
  • Le mode de rémunération. Une contrepartie financière supérieure au coût réel, ou une rémunération basée sur un taux horaire et non un forfait (qui suppose que seule une fourniture de main-d'œuvre est rémunérée) sont des indices d’un prêt de main-d'œuvre illicite.

Qui peut être sanctionné en cas de prêt de main-d'œuvre illicite ?

Les personnes qui peuvent être sanctionnées pour un prêt de main-d’œuvre illicite sont :

  • les auteurs du délit, c’est à dire l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice, qu’ils soient des personnes physiques ou morales ;
  • toute personne complice du délit, c’est-à-dire tout tiers qui a facilité, porté assistance ou aidé à la mise en œuvre du délit de prêt de main-d'œuvre.

Quelle est la sanction en cas de prêt de main-d'œuvre illicite ?

Pour prêt de main-d'œuvre illicite, la sanction peut être d’ordre pénal et administratif.

Les sanctions pénales du délit de prêt de main-d’œuvre

Le prêt de main-d'œuvre illicite est sanctionné pénalement jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30.000 euros d'amende. L'amende est de 150.000 euros pour une personne morale (entreprise).

Ces peines pénales peuvent aller :

  • jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende si l’infraction est commise à l’égard de plusieurs salariés, ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents et connus par l’auteur des faits ;
  • jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende si l’infraction est commise en bande organisée.

Les sanctions administratives et complémentaires du délit de prêt de main-d’œuvre

Des sanctions administratives peuvent être ajoutées :

  • suppression des financements et aides publiques ;
  • remboursements exigés des aides publiques déjà perçues ;
  • fermeture temporaire de l’entreprise ;
  • etc.

Les peines complémentaires

Des peines complémentaires aux sanctions pénales et administratives peuvent être prononcées :

  • interdiction d’exercer certaines activités professionnelles ;
  • exclusion de certains marchés publics ;
  • publication du jugement dans les journaux ;
  • etc.

Vous voilà désormais à jour sur ce qu’il faut savoir du prêt de main-d'œuvre !

FAQ

Qu’est-ce que le délit de marchandage ?

Le délit de marchandage est défini comme un prêt de main-d'œuvre à but lucratif qui a pour effet de porter préjudice au salarié. Une violation des droits du salarié est observée et il subit des conséquences négatives (baisse de salaire, absence d’avantages, etc.).

Comment éviter le prêt de main-d'œuvre illicite ?

Pour éviter un prêt de main-d’œuvre illicite, la convention de prêt de main-d'œuvre doit comporter plusieurs éléments :

  • l’objet du contrat est clairement établi (la prestation définie sans équivoque) ;
  • une rémunération forfaitaire est prévue (la rémunération n’est pas évaluée au temps passé) ;
  • les moyens mis à disposition du salarié émanent de l’entreprise utilisatrice, et non de l’entreprise prêteuse ;
  • le lien de subordination reste intact entre le salarié et l’entreprise prêteuse (l’entreprise utilisatrice n’est qu’une tierce partie sans pouvoir de direction).

Comment facturer la mise à disposition de personnel ?

La facturation de la mise à disposition de personnel doit comporter uniquement les salaires versés au salarié, les charges afférentes et les frais professionnels. Il ne doit y avoir aucune marge bénéficiaire. La facturation se fait sur la base d’un forfait. 

Principales sources législatives et réglementaires :

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