
Entreprise en redressement judiciaire : définition et implications
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Les procédures collectives sont des mesures judiciaires qui ont pour but de garantir la poursuite de l’activité d’une entreprise tout en respectant les droits des créanciers. À ce titre, le déroulement des procédures collectives a été conçu pour mettre en balance les intérêts de l’entreprise en difficulté et ceux de ses créanciers.
La période suspecte illustre parfaitement cette mise en balance. Il s’agit de la période avant un redressement judiciaire ou une liquidation. Les actes de gestion accomplis par le dirigeant durant ce laps de temps sont examinés par le tribunal. Quelle est la durée de la période suspecte ? Quelles sont ses conséquences sur les actes passés durant ce délai ? Legalstart vous explique tout dans cet article.
Mini-Sommaire
La période suspecte désigne le délai écoulé entre la date de cessation des paiements et la date de jugement d'ouverture d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire. Elle concerne uniquement ces deux procédures collectives.
Il s’agit de la date à compter de laquelle l’entreprise n’a plus été en mesure de faire face à ses dettes grâce à ses liquidités (compte bancaire, caisse, créances clients, etc.). Durant ce laps de temps, les actes de gestion accomplis par le dirigeant sont examinés par le tribunal. Ils peuvent être annulés ou faire l’objet de poursuites.
🛠️ En pratique : la date de cessation des paiements permet de déterminer la période suspecte. Cette dernière est fixée par le tribunal lors du jugement d’ouverture.
📌 À retenir : une déclaration de cessation de paiement doit être effectuée par le débiteur dans les 45 jours après sa survenance.
La période suspecte a une durée variable. Elle débute la première heure du jour de la cessation de paiement ou du dépôt de bilan. Cette date est parfois complexe à déterminer, notamment si l’entreprise a obtenu des délais de paiement ou des remises de dettes.
La fin de la période suspecte est la liquidation judiciaire ou la procédure de redressement engagée. La durée de cette période peut aller jusqu’à 18 mois maximum.
☝️ Bon à savoir : il n’existe pas de période suspecte pour une procédure de sauvegarde judiciaire. En effet, elle ne suppose pas d’état de cessation de paiement.
Lors de la période suspecte, l’entreprise continue de fonctionner de manière habituelle. Seulement, le dirigeant prend conscience que son entreprise fait face à d’importantes difficultés. Il ne sera pas en mesure de rembourser l’ensemble de ses créanciers (fournisseur, bailleur, partenaire, etc.).
L’arbitrage du dirigeant d'entreprise va nécessairement être favorable à certains créanciers et défavorable à d’autres. Pour favoriser certains d’entre eux, il peut décider de payer des dettes non échues. En outre, le chef d’entreprise peut vouloir mettre certains biens à l’abri en accomplissant des actes contestables. Par exemple, une donation ou la vente de biens pour un prix inférieur à leur valeur. C’est pourquoi les actes accomplis durant cette période sont qualifiés de suspects.
Une fois la procédure collective ouverte, ils pourront être remis en cause par le tribunal qui va pouvoir annuler ceux qui portent atteinte au principe d’égalité des créanciers. On parle alors de nullité de la période suspecte.
Il existe deux types de nullité pour la période suspecte mentionnés dans le Code Civil :
☝️ Bon à savoir : les nullités de la période suspecte en redressement judiciaire et en liquidation judiciaire fonctionnent de la même manière.
Certains actes accomplis pendant la période suspecte peuvent être annulés de plein droit. Cela signifie que si l’administrateur ou le liquidateur judiciaire demande la résolution de l’acte, le tribunal est obligé de l’accorder.
C’est notamment le cas :
🔎 Zoom : un contrat de travail conclu pendant la période suspecte peut être rendu nul. C’est le cas si la rémunération du contrat est largement supérieure aux minimas conformes à la catégorie d'emploi du salarié ou s’il vise à faire bénéficier le dirigeant de droits sociaux. La nullité rétroactive du contrat entraîne la restitution du salaire par l’employé.
Certains actes commis durant la période suspecte sont soumis à l’appréciation d’un juge pour leur éventuelle annulation. Il s’agit :
L’objectif des nullités de la période suspecte en procédure collective est de reconstituer le patrimoine de l’entreprise pour permettre le remboursement des créanciers. C’est pourquoi, lorsqu’un acte est annulé, cette nullité est rétroactive, mais unilatérale :
Voici un exemple. Pendant la période suspecte, le dirigeant a vendu un bien de l’entreprise pour obtenir un peu de trésorerie. Cependant, il s’avère que le bien a été bradé : le prix de vente ne correspond même pas à un dixième de la valeur réelle du bien. Le tribunal a donc prononcé la nullité de la vente.
En principe, l’acheteur devrait rendre le bien vendu au vendeur, et le vendeur devrait rendre l’argent déboursé à l’acheteur. Toutefois, ce n’est pas le cas !
En procédure collective, l’entreprise en difficulté qui a bradé un de ses biens en période suspecte le récupère. En revanche, elle n’a pas à en rembourser le prix au créancier vendeur. Le vendeur va donc avoir une créance qu’il doit déclarer au passif du débiteur, en procédant à une déclaration de créances.
Dans une procédure de tutelle ou de curatelle, il existe une période suspecte de 2 ans. Elle correspond à la période qui précède la mesure. Un juge peut alors annuler les actes passés pendant ce laps de temps s’ils remplissent deux conditions :
Le tribunal détermine le début de la période suspecte lorsqu’il fixe la date de la cessation de paiement.
L’état de cessation de paiement est défini lorsqu’une entreprise ne peut pas faire face à son passif exigible (ses dettes) avec ses actifs disponibles (sa capacité de financement).
Principales sources législatives et réglementaires :
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Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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