La dissolution d’une EURL sans liquidation : comment ça se passe ?
Margaux Dalon
Diplômée de l’EDHEC Business School et de la faculté libre de droit de Lille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
La dissolution d'une société marque sa fin de vie, c'est-à-dire la cessation de ses activités. C'est un événement important, qui précède, en principe, la liquidation. La dissolution constitue la première étape pour fermer son EURL.
La dissolution d'une EURL présente certaines spécificités par rapport à la procédure de dissolution-liquidation classique. En effet, pour dissoudre et liquider une EURL dont l'associé unique est une personne morale, le législateur a prévu une procédure plus rapide et moins onéreuse. Par conséquent, la dissolution d’une EURL sans liquidation n’est possible que dans certains cas spécifiques. On vous explique tout.
Mini-Sommaire
La dissolution d'une EURL dont l'associé unique est une personne morale
L’EURL est la version unipersonnelle de la SARL. Lorsque l’associé unique de la société est une personne morale, c’est-à-dire une autre entreprise, il est possible de procéder à la dissolution de l’EURL sans liquidation.
La dissolution sans liquidation d’EURL
Il est courant d’entendre parler de dissolution-liquidation, car en principe, la dissolution entraîne la liquidation de la société. La procédure de liquidation d'une société est ouverte par une décision prise par les associés, de mettre fin à l’activité. Suite à cette décision qui est formalisée dans un procès-verbal de liquidation, les actifs de la société sont évalués puis vendus, afin que les créanciers soient payés et éventuellement les associés ayant effectué un apport.
Toutefois, par exception, les filiales détenues à 100% par une société mère peuvent suivre une procédure simplifiée, moins coûteuse et plus rapide. Il s’agit de la transmission universelle du patrimoine.
Ainsi, les EURL dont le capital est entièrement détenu par une société mère n’ont pas à être liquidées après leur dissolution. La loi prévoit la possibilité de procéder à la transmission universelle du patrimoine de la société fille à sa mère, sans qu’il y ait lieu de procéder à la liquidation de la société.
Concrètement, cela signifie que la dissolution d'une EURL ne donnera pas lieu à une phase de liquidation.
Cette dissolution sans liquidation via la transmission universelle du patrimoine correspond à l’absorption par la société mère de sa filiale, dont elle détient 100% des titres.
Cela signifie qu’une fois la dissolution de l’EURL prononcée, l’ensemble du patrimoine de la société dissoute, incluant aussi bien les créances que les dettes de la société, est transféré à la société mère.
Cela présente un avantage certain : sans liquidation, les formalités de dissolution liquidation sont allégées.
⚠️ Attention :
Si vous souhaitez arrêter uniquement temporairement votre activité, vous pouvez décider de la mettre en sommeil. On parle également de la cessation d'activité de l'entreprise.
Les conséquences pour l’associé unique
En EURL, la dissolution sans liquidation implique une responsabilité illimitée de l’associé unique.
Par conséquent, la responsabilité de la société mère n’est plus limitée à ses seuls apports. Elle doit personnellement supporter l’ensemble des dettes de sa filiale.
Cela implique notamment que si l’actif de la filiale n’est pas suffisant pour couvrir son passif (plus de dettes que de ressources), la société mère devra puiser dans son propre patrimoine pour désintéresser les créanciers de l’EURL ou de la SASU absorbée.
Cela contredit donc le principe de limitation de responsabilité propre aux SAS et SARL, dont la SASU et l’EURL sont les émanations unipersonnelles.
En effet, en principe, constituer une SASU ou EURL permet de limiter la responsabilité de l’associé au montant de ses apports. La société constitue une sorte d’écran protecteur. Les créanciers ne pouvant pas se servir dans le patrimoine personnel du fondateur. Fermer une SASU, comme la fermeture d'une EURL, remet donc en cause ce principe.
Dans l’hypothèse où l’associé unique est une société, ce principe ne trouve plus à s’appliquer. Lors de la dissolution de l’EURL, la société mère doit assumer personnellement les dettes de la société dissoute, quitte à puiser dans son propre patrimoine.
Cette responsabilité illimitée de l’associé personne morale est la contrepartie de la simplification des démarches en cas de transmission universelle de patrimoine à la société mère. L’absence de procédure de liquidation à proprement parler sur l’EURL justifie que la société mère supporte le poids des dettes de la société absorbée, quelle que soit leur ampleur.
La protection des droits des créanciers de la société dissoute
Même en cas de dissolution de l’EURL sans liquidation, les intérêts des créanciers de la société dissoute ne sont pas négligés.
Ces derniers disposent d’un délai de 30 jours, à compter de la publication de la décision de dissolution dans un journal d’annonces légales, pour faire opposition à l’absorption par la société mère de sa filiale.
Cette mesure vise en effet à protéger leur droit à être payé. En cas de transmission universelle du patrimoine, les créanciers de la société dissoute se retrouvent en concurrence avec les créanciers personnels de la société mère, associé unique, ce qui réduit leur chance d’être payés. En effet, la liquidation de l’EURL n'implique pas de réaliser des comptes de clôture, c'est-à-dire de calculer le boni de liquidation ou le mali de liquidation grâce auquel les créanciers sont payés.
Dans le cas où une opposition est formée par les créanciers de la société dissoute, un juge doit intervenir :
- Soit pour rejeter l’opposition, s’il ne la considère pas fondée ;
- Soit pour ordonner le remboursement des créances ou la constitution de garanties assurant le remboursement des créances, en dépit du changement du débiteur.
Dans ce dernier cas de figure, la transmission universelle de patrimoine ne pourra avoir lieu que lorsque les mesures ordonnées auront effectivement été mises en œuvre.
Le cas particulier de la société unipersonnelle soumise à une procédure collective
La transmission universelle du patrimoine est une disposition dite d’ordre public. Cela signifie qu'il n’est pas possible d’y déroger en prévoyant conventionnellement (dans les statuts par exemple) une procédure différente. La dissolution d’une société unipersonnelle dont l’associé unique est une personne morale entraîne donc, en principe, la transmission universelle de son patrimoine à sa mère.
Toutefois, lorsqu’une société unipersonnelle est soumise à une procédure collective, il ne peut pas y avoir transmission universelle du patrimoine. Par conséquent, à la dissolution de la société unipersonnelle, succède une liquidation judiciaire qu'il faut bien distinguer de la liquidation amiable, qui ne permet pas la transmission universelle du patrimoine.
Ainsi, à compter de la date du jugement d’ouverture de redressement ou de liquidation judiciaire (qui marque le début de la procédure collective), il n’est plus possible de transmettre le patrimoine de la filiale à sa mère. Les règles classiques de dissolution-liquidation dans le cadre d’une procédure collective ont donc vocation à s’appliquer.
La dissolution d'une EURL dont l'associé unique est une personne physique
La dissolution d’une EURL sans liquidation dont l’associé unique est une personne physique n’est pas possible. Lorsque l’associé unique est une personne physique, c’est-à-dire un être humain, la dissolution de la société unipersonnelle est obligatoirement suivie d’une liquidation. À défaut, la procédure de fermeture de la société n’est pas aboutie.
Cela s’explique par le fait qu’accepter une dissolution d’EURL sans liquidation reviendrait à faire peser l’ensemble des dettes de la société sur la tête d’une personne individuelle. Or, le patrimoine d’une personne physique est rarement aussi important que celui d’une société. Cela pourrait avoir des conséquences désastreuses sur la situation personnelle de l’associé unique, mais aussi pour les créanciers.
C’est pourquoi le législateur a prévu une "exception à l’exception" : lorsqu’une société dont l’associé unique est une personne physique (c'est-à-dire un particulier) est dissoute, il n’y a pas transmission universelle de son patrimoine, mais liquidation.
Le but est donc ici de protéger l’associé unique, particulier. Sa responsabilité reste limitée au montant de ses apports, ce qui implique que les créanciers ne pourront se rembourser que sur les actifs de la société et non sur le patrimoine personnel de l’associé.
L'esprit des EURL est alors respecté et on rejoint le droit commun qui limite la responsabilité des associés de SARL au montant des apports de chaque associé.
Cette solution est donc avantageuse pour les associés d'une EURL liquidée.
Pour dissoudre et liquider l'EURL, il sera alors nécessaire de respecter ces étapes :
- la décision de cessation d’activité ;
- la publication d’un avis de dissolution ;
- la nomination d’un liquidateur ;
- les opérations de liquidation ;
- le boni ou le mali de liquidation.
Décision de la cessation d’activité
La décision de cessation d’activité est prise par l’associé unique de l’EURL.
Il n’a pas besoin de convoquer une Assemblée générale extraordinaire pour faire voter cette décision, puisqu’il est seul décisionnaire. Toutefois, l’associé unique doit dresser un procès-verbal de dissolution de la société unipersonnelle mentionnant notamment la nature de la décision, la date de prise d’effet, et éventuellement le nom du liquidateur. Ce document écrit doit être daté et signé par l’associé unique.
De plus, cette décision grave pour la société doit faire l’objet d’une annotation dans le registre des décisions de l’associé unique.
Nomination du liquidateur
Le liquidateur de l’EURL peut être l’associé unique, le gérant ou un tiers compétent.
Généralement, il est désigné directement dans le PV de décision de cessation d’activité de la société. Cependant, il peut être nommé par acte séparé.
Le liquidateur agit au nom et pour le compte de la société jusqu’à la fin des opérations de liquidation. S’il s’agit d’une autre personne que l’associé unique personne physique, il doit rendre des comptes à ce dernier. En pratique, dans une EURL, c’est souvent le gérant (d’autant plus s’il est également l’associé unique) qui est désigné pour liquider la société.
Publication d’un avis de dissolution
La décision de clôturer l’EURL doit faire l’objet d’une publication dans un journal d’annonces légales (JAL). La publicité permet d’avertir les tiers intéressés par la fermeture de la société. Cela concerne principalement les créanciers. Ils disposent alors d’un délai de 30 jours à compter de la publication pour déclarer leurs créances auprès du liquidateur.
En l’absence d’une telle déclaration de créances dans le cadre d’une liquidation amiable, le créancier prend le risque de ne pas être désintéressé si sa créance est omise dans la procédure.
L’avis de dissolution doit mentionner :
- la décision de cesser l’activité ;
- la date du PV de décision ;
- le nom du liquidateur.
Opérations de liquidation
Lorsque l’associé unique est une personne physique, le liquidateur est chargé de l’ensemble des opérations de liquidation de l’EURL. Cela inclut notamment le dépôt du procès-verbal de décision de dissolution de la société auprès du greffe du tribunal.
De plus, il doit établir un inventaire exhaustif de l’actif et du passif de la société unipersonnelle. Il procède à la vente des actifs de la société et règle les créanciers.
En outre, le liquidateur doit établir la clôture des comptes qui doivent être approuvés par l’associé unique. L’approbation des comptes doit également être déposée au greffe du tribunal par le liquidateur.
Boni ou mali de liquidation
À la suite de la vente des actifs de l’EURL et au désintéressement des créanciers par ordre de priorité, deux cas de figure peuvent se présenter :
- soit la liquidation est excédentaire ;
- soit la liquidation est déficitaire.
Si à la clôture des comptes le liquidateur constate qu’un reliquat persiste, alors ce que l’on appelle le boni de liquidation peut être versé à l’associé unique. Sachez que le boni de liquidation ne fait pas l'objet de droits d'enregistrement dans les EURL. Il s'agit là d'un avantage notable qu'il ne faut pas négliger !
Si au contraire, l’actif de la société n’a pas suffi à régler l’ensemble des dettes, alors l’associé unique doit désintéresser les créanciers dans la limite de ses apports. C’est pourquoi, un capital social trop faible en EURL peut inquiéter les fournisseurs et autres partenaires commerciaux.
À l'issue de cette procédure, la dissolution-liquidation de l'EURL sera effective et la société sera radiée du Registre du commerce et des sociétés.
Dissoudre une EURL requiert de suivre un processus spécifique, qu’il convient de connaître et d’anticiper. Certes plus rapide et moins onéreuse, cette procédure peut toutefois comporter des risques pour l’associé unique. Il est également possible de mettre en sommeil une EURL.
📝 À noter :
Si votre EURL est une société holding et détient des filiales, il est important de bien anticiper la dissolution de la holding qui peut avoir des répercussions importantes sur la fiscalité du reste du groupe.
Principales sources législatives et réglementaires :
- Article 1848 - Code civil
- Article 1844-4 - Code civil
- Article 1844-5 - Code civil
Note du document :
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Margaux Dalon
Diplômée de l’EDHEC Business School et de la faculté libre de droit de Lille.
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