Quelles sont les missions du CSE ?
Droit d’alerte : comment le faire valoir ?
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
Si une fois que vous avez finalisé le processus de création d'entreprise, vous avez embauché au moins 11 salariés, il est obligatoire de mettre en place un Comité social et économique (CSE). C'est l’unique instance représentative du personnel au sein d’une entreprise. Les membres élus du CSE disposent de plusieurs prérogatives, notamment la possibilité de saisir l’employeur grâce à la procédure d’alerte du CSE.
Vous souhaitez connaître les différentes situations dans lesquelles le CSE peut exercer son droit d’alerte ? Voici tout ce qu’il faut savoir dans cet article !
Mini-Sommaire
Qu’est-ce que le droit d’alerte ?
Le droit d’alerte désigne le droit d’un salarié à avertir son employeur s’il constate qu’un danger grave et imminent pèse sur sa vie ou celle des autres employés. Cette notion renvoie également au devoir du salarié à alerter sa hiérarchie en cas de danger physique ou psychique pour lui ou ses collègues. Elle concerne aussi l’atteinte aux libertés individuelles.
Le salarié concerné dispose de plusieurs moyens pour prévenir son employeur :
- par écrit (courrier recommandé, note de service, e-mail) ;
- de vive voix ;
- lors d’un appel téléphonique ;
- en s’adressant aux membres du CSE.
Le droit d’alerte est une mesure d’urgence. Ce sont les membres du CSE qui sont habilités à faire valoir ce droit auprès de l’employeur en sollicitant des explications. Pour cela, il n’est pas nécessaire d’attendre une réunion du CSE, l’alerte doit être immédiate pour protéger les salariés.
Quelle est la différence entre le droit d’alerte et le droit de retrait ?
Le droit d’alerte est à distinguer du droit de retrait. En effet, ce dernier implique une situation de danger grave et imminent qui entraîne un salarié à quitter son poste de travail. Il intervient dans des circonstances exceptionnelles et il est guidé par un motif raisonnable. Le droit d’alerte, quant à lui, n’autorise pas le salarié à arrêter son activité professionnelle.
Toutefois, le droit d’alerte peut précéder le droit de retrait si la situation le justifie.
📝 À noter : si le droit de retrait abusif ou injustifié peut entraîner une sanction, ce n’est pas le cas du droit d’alerte qui ne provoque pas l’arrêt de l’activité professionnelle.
Qui peut exercer un droit d’alerte ?
Le droit d’alerte, selon le Code du travail, peut être exercé par tout salarié ou membre du CSE. Cela concerne aussi bien les employés du privé que ceux de la fonction publique. Ainsi, les agents de la fonction publique qu’ils soient titulaires, contractuels ou stagiaires peuvent exercer ce droit.
Dans quels cas le CSE peut-il exercer son droit d’alerte ?
Le droit d’alerte du CSE peut être exercé dans plusieurs cas fixés par la loi. Les situations qui le permettent selon le Code du travail sont les suivantes :
- en cas d’atteinte aux droits des personnes, dès lors que les droits d’un salarié sont mis à mal, tout membre peut saisir l’employeur pour déclencher une alerte au CSE. C’est notamment le cas lorsqu’un salarié subit un harcèlement moral, sexuel ou une mesure de discrimination. Le CSE peut avoir recours aux droits d’alerte psycho-sociaux s’il constate certains signaux comme des arrêts de travail répétés ou des démissions.
- en cas de danger grave et imminent, le CSE peut saisir l’employeur s’il constate l’existence d’un danger grave dans un délai proche pouvant porter atteinte à la santé des salariés. Ce danger peut par exemple provenir d’un équipement défectueux ;
- en cas de risque grave environnemental, un membre du CSE constate un risque grave pour la santé publique ou l'environnement dans l’entreprise. Ce droit d’alerte, par exemple, peut être exercé lors de l’utilisation d’un produit nocif.
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE dispose de deux autres droits d’alerte :
- le droit d’alerte économique conduit le CSE à demander des explications à l’employeur s’il constate que des faits mettent en péril la situation économique de l’entreprise ;
- le droit d’alerte social qui permet de dénoncer le recours excessif à des contrats de travail précaire (CDD, contrat de travail temporaire, etc.).
Quelle est la procédure pour déclencher un droit d’alerte ?
Il n’y a plus de Cerfa de droit d’alerte au CSE, comme c’était le cas pour les anciennes instances représentatives du personnel. De nos jours, pour le droit d’alerte, la procédure est spécifique à chaque type d’alerte.
La procédure en cas d’atteinte aux droits des personnes
Le droit d’alerte pour l’atteinte aux personnes implique que le membre du CSE qui le remarque saisisse immédiatement l'employeur. Le CSE procède à une enquête afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires pour remédier à cette situation.
Si l’employeur ne prend pas les mesures nécessaires, le CSE peut saisir le Conseil des prud’hommes. Toutefois, cette procédure n’est possible que si le salarié concerné par l’atteinte donne son accord.
La procédure en cas de danger grave et imminent
Le membre du CSE doit alerter immédiatement l’employeur en cas de danger grave et imminent. Cette alerte doit ensuite être consignée par écrit dans un registre spécial, datée et signée. L’alerte doit mentionner :
- les postes de travail concernés par le danger ;
- la nature et la cause du danger ;
- le nom des travailleurs qui y sont exposés.
L’employeur procède à une enquête avec le membre du CSE qui a donné l’alerte. Il doit prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ce danger.
Il arrive qu’il y ait désaccord entre l’employeur et le CSE quant à la gravité du danger, la nécessité ou le moyen de le faire cesser. Dans ce cas, le CSE doit être réuni d’urgence, sous 24 heures. L’inspecteur du travail et un agent du service de prévention de la CARSAT doivent être informés et conviés.
Si l'employeur et les élus du CSE trouvent un accord, l'employeur doit prendre immédiatement les mesures arrêtées lors de la réunion d'urgence. À l’inverse, si les deux parties n’y parviennent pas, l'inspecteur du travail est saisi immédiatement par l'employeur.
📝 À noter : un délit d'entrave au CSE peut être caractérisé si l'employeur refuse l'enquête. Il peut alors être mis en demeure par la Dreets (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) de remédier à cette situation.
☝️ Bon à savoir : le CSE peut déclencher le droit d'alerte en cas de danger grave et imminent pour la santé publique.
La procédure en cas de risque grave pour l’environnement
Face à la présence d’un risque grave pour l’environnement, le membre du CSE doit immédiatement alerter l’employeur. Il peut le faire verbalement, mais également par écrit, en rédigeant une lettre de droit d’alerte du CSE. Là encore, l’alerte est consignée dans un registre spécial, où elle est datée et signée. Elle indique :
- les produits ou procédés de fabrication qui présentent un risque pour la santé ou l’environnement ;
- leurs conséquences possibles ;
- toute information utile pour apprécier l’alerte.
L’employeur doit estimer les risques causés par la situation avec le CSE. Il doit informer ses membres de ses décisions sous 1 mois.
Si l’employeur estime qu’il n’existe pas de risque grave, ou s’il n’intervient pas durant ce délai, le CSE peut saisir le préfet départemental.
La procédure d’alerte économique (entreprise d’au moins 50 salariés)
Le CSE peut demander des explications à l’employeur lorsque la situation économique de l’entreprise est préoccupante. Les questions du CSE sont inscrites à l’ordre du jour de la prochaine réunion, et l’employeur ne peut s’y opposer.
Un rapport est adressé au commissaire aux comptes et à l’employeur :
- si le CSE considère les réponses de l’employeur insuffisantes ;
- si l’employeur confirme que la situation est préoccupante.
La procédure d’alerte sociale (entreprise d’au moins 50 salariés)
Une forte hausse de contrats de travail précaires (CDD ou intérim) peut pousser le CSE à demander des explications à l’employeur. Si la majorité des membres du CSE en font la demande, le sujet est mis à l’ordre du jour de leur prochaine réunion. L’employeur doit alors communiquer :
- le nombre de salariés employés en intérim ou en CDD ;
- les raisons qui sont à l'origine de ce recrutement ;
- le nombre de jours de travail accomplis par ces employés depuis la dernière réunion sur le même sujet.
Le CSE peut faire le choix de saisir l’inspection du travail :
- sur la base de ces constatations ;
- s’il a des faits pouvant caractériser un recours abusif à ces contrats précaires.
Dans ce cas, l’employeur devra expliquer quels sont les moyens qu’il va utiliser pour limiter ce type de contrat.
Droit d’alerte : quelles conséquences pour l’employeur ?
L’employeur ne peut pas contester le droit d’alerte. Cependant, il peut être en désaccord avec :
- la véracité des faits ;
- le degré de gravité du danger mentionné ;
- la façon de remédier à la situation.
En outre, l’employeur a une obligation de sécurité et de protection de la santé psychique et morale des salariés. Dans ce cadre, il doit mener une enquête sur tout risque qui lui est rapporté. Si un risque est avéré, il est chargé de protéger ses employés et de prendre les mesures qui s’imposent.
Si aucun compromis n’est trouvé, il peut tout comme le CSE saisir les inspecteurs de la Direccte pour que ces derniers trouvent une solution.
FAQ
L'employeur peut-il contester le droit d’alerte ?
Non, l’employeur ne peut pas contester le droit d’alerte en lui-même, ce dernier n’impliquant pas d’arrêt du travail contrairement au droit de retrait. L’employeur a cependant le droit d’être en désaccord avec la nature ou le degré du danger indiqué ou sur la solution à y apporter.
Qu'est-ce qu'un danger grave et imminent au travail ?
On peut le définir comme un risque pouvant entraîner la maladie, une incapacité temporaire ou permanente, voire la mort d’un salarié dans un délai proche. Ce risque est à examiner au cas par cas.
Comment signaler un danger au travail ?
Le danger doit être signalé à l’employeur sous forme écrite (lettre recommandée, en main propre ou par mail), par téléphone ou de vive voix. Le salarié qui constate le danger peut également contacter directement le CSE.
Principales ressources législatives et réglementaires :
- articles L4131-1 à L4131-4 - Code du travail
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Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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