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Fiches pratiques Exercer un métier Métiers dans le commerce Ouvrir un coffee-shop en France : possible ?

Ouvrir un coffee-shop en France : possible ?

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Pierre Jeannel

Etudiant à Sciences Po Paris et à University College London.


Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.

Depuis quelques mois, les métropoles françaises voient fleurir dans leurs rues un nouveau type de commerce qui est loin de faire l’unanimité. Profitant d’un flou juridique qui les autoriserait à vendre leurs produits au public, coffee-shops et autres “boutiques à herbe” se développent rapidement. Le marché potentiel est énorme : plus d’un milliard d’euros selon l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (2016).

Mais qu’en est-il vraiment de leur légalité : peut-on désormais vendre du cannabis en France sans craindre d’être poursuivi pénalement ? Si la consommation de cannabis devrait bientôt être passible d’une amende forfaitaire de 300€, les récentes enquêtes préliminaires ouvertes par le parquet de Paris et confiées à la brigade des stupéfiants et du proxénétisme mettent en lumière le fait que sa vente demeure une infraction pénale grave.

Mini-Sommaire

La vente de cannabis est-elle devenue légale ?

Contrairement à ce qu’on a pu lire sur certains sites, la vente de cannabis n’est pas devenue légale, loin s’en faut. Le Code pénal prévoit que la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites de stupéfiants sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende (article 222-37). L’article R.5136-92 du Code de la Santé publique précise par ailleurs que le cannabis, sa plante et sa résine, ainsi que les produits qui en contiennent, sont interdits à la "production, la fabrication, le transport, l'importation, l'exportation, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l’emploi".

Néanmoins, un arrêté ministériel du 22 août 1990 prévoit une dérogation : si elles comportent une teneur en delta-9-tétrahrydrocannabinol (THC) inférieure à 0,2%, les plantes de cannabis peuvent être utilisées à des fins industrielles ou commerciales. Inscrit par les autorités sanitaires sur la liste des produits stupéfiants, le THC est en effet un psychotrope puissant et strictement encadré.

Sur la base de cet arrêté, de nombreux vendeurs ont mis sur le marché français des produits quasiment dépourvu de THC et contenant majoritairement un autre composé actif du cannabis, le cannabidiol (CBD). Contrairement au THC, sa consommation n’a pas d’effets psychoactifs, et n’est donc pas interdite. C’est cet élément qui fait aujourd’hui débat. Suffit-il qu’un produit comporte 99,8% de CBD et seulement 0,2% de THC pour qu’il soit autorisé à la vente ?

Cannabis light : les produits interdits et autorisés

En maintenant leurs produits sous le seuil des 0,2% de THC, les coffee-shops français s’exposent aux sanctions précitées.

Pour mettre un terme à leur expansion, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) a publié le 11 juin dernier une mise au point sur la vente de produits contenant du CBD : "le taux de 0,2 % de THC n’est pas un seuil de présence dans le produit fini, mais dans la plante elle-même. […] La présence de THC dans les produits finis, quel que soit son taux, est interdite". On ne peut donc pas vendre de produits dérivés du cannabis contenant du CBD (liquide de cigarettes, tisanes, huiles essentielles…) si la moindre présence de THC est détectée, même en dessous de 0,2%.

De plus, la MILDECA précise que non seulement les produits finis doivent contenir 100% de CBD ou autres composants autorisés pour pouvoir être commercialisés légalement, mais qu’ils doivent également être obtenus à partir de certaines variétés de chanvre expressément autorisées par le Code de la santé publique. Ces variétés doivent être dépourvues de propriétés stupéfiantes, ce qui est rarement le cas en pratique.

Enfin, il est à noter qu’utiliser ou vendre les fleurs ou feuilles du chanvre, quelle qu’en soit sa variété, n’est pas autorisé, même sous la forme de produits transformés. La vente de fleurs de cannabis, telle qu’elle se répand actuellement dans les magasins spécialisés, est purement et simplement interdite. Seules certaines variétés de chanvre, uniquement sous la forme de graines ou de fibres, peuvent être commercialisées si elles contiennent moins de 0,2% de THC et figurent sur la liste définie par le Code de la santé publique. Les seuls produits finis autorisés doivent être issus de ces variétés réglementées, être obtenus de leurs graines ou de leurs fibres, et ne doivent pas comporter de THC.

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Le cannabis “pour lutter contre le stress” ?

Les méthodes de commercialisation du CBD sont également réglementées. Comme l’a récemment rappelé le Tribunal correctionnel de Marseille en condamnant les dirigeants de la société Kanavape, faire de la publicité ou promouvoir des produits à base de CBD en mettant en avant de soi-disant vertus thérapeutiques est un délit qui peut coûter jusqu’à deux ans de prison. Seuls les médicaments autorisés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ou par la Commission européenne sur la base d’un dossier évalué selon des critères scientifiques de qualité, de sécurité et d’efficacité, peuvent être commercialisés en mettant en avant leurs vertus thérapeutiques.

Ainsi, les coffee-shops et boutiques qui vantent les effets anti-stress ou anti-douleur de leurs produits sans autorisation s’exposent à des condamnations pour exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie.

Ouvrir un coffee shop, une entreprise comme les autres ?

Vous l'aurez compris, il n'est pas question d'ouvrir un coffe shop comme on ouvre son salon de thé : ce n’est pas du tout un projet comme un autre. Les situations licites sont l’exception et les pouvoirs publics ont annoncé leur volonté de sanctionner durement les contrevenants. Attention donc, il s’agit d’un domaine d’activité très risqué. Ceci ayant été rappelé, dans les rares cas autorisés par la loi, l’activité de vente de produits à base de CBD devra être mise en oeuvre dans le cadre juridique habituel, micro-entreprise ou SASU ou EURL si vous êtes seul ou SAS ou SARL si vous êtes plusieurs.

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