Zoom sur le tableau de bord financier
Comment faire un apport en compte courant d’associé ?
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
La distinction entre apport en compte courant d'associé et capital social est souvent mal comprise. Dans la plupart des sociétés civiles et commerciales, un capital social minimum doit être constitué. La loi a considérablement simplifié les choses pour encourager la création d’entreprise. Désormais, le capital social de toute société commerciale (à l’exception de la Société Anonyme) peut être constitué avec 1 euro seulement !
En pratique, toutefois, les besoins de trésorerie de l’entreprise vont, dès le démarrage, requérir des investissements en fonds propres plus importants. L’apport en compte courant d’associé est souvent utilisé comme une alternative à l’apport en capital.
Dans ces conditions, comment ventiler au mieux entre apports en capital et apport en compte courant d’associé ? Explications.
Mini-Sommaire
Qu’est-ce qu’un apport en compte courant d’associé ?
Le compte courant d’associé est un prêt accordé par un associé à la société, pour optimiser le financement de l'entreprise, et de l’activité de cette dernière. Ainsi, afin de pouvoir effectuer un apport en compte courant d’associé, il faut nécessairement être associé (ou actionnaire) ou être dirigeant de la société. Il est possible de procéder à un apport en compte courant d'associé bloqué ou débloqué.
Ce type d’apport se caractérise comme suit :
- l’apport en compte courant constitue un prêt. Les sommes ainsi prêtées ont pour vocation d’être remboursées et éventuellement rémunérées ;
- l’alimentation du compte courant d’associé peut provenir de deux sources, soit de versements réalisés par l’associé ou le gérant ayant puisé dans son patrimoine personnel, soit de sommes dues par la société (rémunération ou dividendes par exemple), volontairement prêtés à la société ;
- l’apport peut être consenti contre rémunération ou gratuitement. L’associé personne physique qui consent un tel apport peut renoncer à la perception d’intérêts d'un compte courant d'associé ;
- il est possible de procéder à un abandon de compte courant d’associé. C'est notamment le cas lorsque la société rencontre des difficultés financières par exemple.
☝️ Bon à savoir : en l’absence de convention d’apport en courant d’associé qui détermine les conditions de cette opération, et notamment la durée du prêt, celui-ci est considéré comme étant à durée indéterminée.
Quelle est la différence entre un apport en compte courant d’associé et en capital ?
Il est impératif de bien distinguer le capital social des capitaux propres, et du compte courant d’associé.
Le capital social correspond au montant des apports des associés. En revanche, le montant des capitaux propres représente les ressources internes dont dispose la société à long terme par opposition aux ressources externes comprenant notamment les emprunts bancaires ou encore les avances en comptes courants consenties par les associés.
Le montant des capitaux propres est obtenu en additionnant principalement le capital, les réserves, les bénéfices non distribués des exercices antérieurs, le bénéfice de l'exercice, les provisions réglementées et en déduisant les pertes. En résumé, voici comment sont appréhendés les capitaux propres et le capital social du point de vue de la comptabilité :
Capitaux propres = Capital social (apports des associés) + réserves légales et statutaires + reports à nouveau bénéficiaire + provisions règlementées – pertes antérieures
📝 À noter : lorsque le montant des capitaux propres est, en raison de pertes, inférieur à la moitié du capital social, il faut reconstituer le capital. La société est alors soumise à certaines obligations puisqu’elle est considérée comme étant en difficultés.
De son côté, l’apport en courant d’associé permet aux associés de réaliser un apport au moment de la création de la société sans pour autant venir augmenter le capital social. Ainsi, ils renforcent les fonds propres et permettent à l’entreprise d’avoir une trésorerie. Autre différence entre le capital social et l’apport en compte courant d’associé : le courant d’associé est prêt qui par définition a vocation à être remboursé à la date prévue ou à la demande de l’associé, tandis que le capital social reste dans la société jusqu’à sa dissolution. Les associés peuvent également vendre leurs parts pour récupérer leur apport.
☝️ Bon à savoir : il est possible de réaliser un apport en compte courant d’associé au moment de la création de l’entreprise et/ou à tout moment au cours de la vie de la société.
Comment choisir entre apport en compte courant d’associé et en capital ?
Pour financer les besoins de trésorerie initiaux, les associés peuvent effectuer des apports en capital ou des apports en compte courant d’associés. Ils peuvent également procéder à une augmentation du capital social de l'entreprise en cours de vie. Pour choisir entre apport en compte courant d’associé et apport en capital social, il convient donc de connaître les avantages et les inconvénients de chacun.
Concernant l’apport en courant d’associé, les avantages et les inconvénients sont les suivants :
Avantages de l’apport en compte courant |
Inconvénients de l’apport en compte courant |
Rapidité et simplicité des démarches |
Peut être récupéré à tout moment par l’associé |
Renforcer les capitaux propres |
Préférence des investisseurs pour un capital social important |
Générer de la trésorerie |
Ne donne pas de droits de vote supplémentaires |
Faciliter l’obtention d’un prêt bancaire |
|
Rémunérer l’associé grâce au taux d’intérêt éventuel |
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☝️ Bon à savoir : en principe l’associé qui prête de l’argent à la société via un apport en compte courant d’associé peut demander le remboursement du prêt à tout moment, dès lors que cela ne met pas en danger la santé financière de l’entreprise.
Concernant l’apport en capital social, il permet de prouver l’implication à long terme des associés dans la société. Cela inspire donc davantage confiance aux tiers, comme les investisseurs, d’autant que le montant du capital social est indiqué sur les statuts et tous les documents légaux de la société. Ce qui n’est pas le cas de l’apport en compte courant qui n’est visible que sur le bilan de la société.
Toutefois, à moins que la société n’ait besoin d’afficher un capital social élevé, il est intéressant de combiner apport en capital social et apport en compte courant d’associé. Deux raisons principales à cela.
D’une part, contrairement aux fonds affectés au capital social, ceux apportés sous forme d’apports en compte courant restent disponibles. L’apport en capital est quant à lui bloqué sur le compte de la société pendant toute sa durée et n’est remboursé à l’associé qu’au jour de la dissolution de la société et après tous les autres créanciers sociaux. L’apport en compte courant, quant à lui, est en principe remboursé dès que l’associé l’exige et dans la mesure où la trésorerie le permet.
Ainsi, lorsque les associés souhaitent constituer des fonds propres importants sans immobiliser les sommes investies, consentir un prêt à la société sous la forme d’un compte courant d’associé peut constituer une alternative à l’apport en capital.
📝 À noter : l’argent récupéré par l’associé en vertu de sa créance n’est pas considéré comme une rémunération. Lorsque l’associé récupère l’argent prêté, il ne paye dessus ni charges ni impôt.
D’autre part, en cas de pluralité d’associés, il peut être nécessaire de constituer un capital social peu élevé dans l’hypothèse où les moyens financiers d’un des associés sont réduits par rapport à ceux des autres. Les besoins de trésorerie de la société peuvent être satisfaits et l’associé démuni peut conserver une part significative du capital grâce à une avance concédée par un associé dont les moyens sont plus élevés.
☝️ Bon à savoir : au cours de la vie de la société, réaliser un apport en compte courant d’associé permet d’éviter d’avoir à réaliser les démarches liées à une augmentation de capital social (vote des associés, mise à jour des statuts, dossier de modification, etc), et les frais attachés. L’apport en compte courant est, en effet, plus rapide et moins coûteux surtout s’il est accordé à titre gratuit. Toutefois, si une durée est spécifiquement prévue dans la convention d’apport en compte courant d’associé, ce dernier est bloqué pour toute cette durée. L’associé ne peut pas retirer l’argent de la société avant cette date.
N'hésitez plus à combiner les deux lors de la création de votre entreprise et laissez vous accompagner dans vos démarches pour ouvrir un compte courant d'associé !
Quelles sont les étapes pour faire un apport en compte courant d’associé ?
Pour procéder à un apport en compte courant d’associé, que ce soit lors de la création de la société ou au cours de sa vie, plusieurs étapes doivent être suivies :
- le procès-verbal d’apport en compte courant d’associé ;
- la convention d’apport en compte courant d’associé (facultative) ;
- le versement de l’associé ;
- la rémunération de l’apport en compte courant d’associé (facultative).
Le procès-verbal d’apport en compte courant d’associé
Même si l’apport en compte courant d’associé relève d’un acte volontaire de la part de l'associé, il nécessite de recueillir l’approbation de l’ensemble des associés avant de procéder au versement.
📝 À noter : dans le cadre d’une société unipersonnelle (EURL ou SASU), l’associé unique est le seul à prendre cette décision. Il lui suffit donc d’inscrire sur le registre des décisions de l’associé unique, le compte courant de l'EURL ou de la SASU.
Ainsi, une assemblée générale doit être convoquée pour procéder au vote de cette décision. À l’issue de l’AG, un procès-verbal d’apport en courant d’associé doit être rédigé et signé, afin de formaliser l’accord des associés pour réaliser cette opération.
🛠️ En pratique : le contenu du PV d’apport en compte courant d’associé est le même que pour la prise de n’importe quelle décision collective.
La convention de compte courant d’associé
Suite à l’acceptation des associés, l’apport en compte courant d’associé peut faire l’objet d’une convention de compte courant d’associé. Ce n’est pas une obligation, mais cela est souvent préférable, afin de clarifier l’objet du versement réalisé par l’associé et les conditions de remboursement et de rémunération, le cas échéant.
La convention de compte courant d’associé doit contenir a minima :
- l’identité des parties (société et associé apporteur) ;
- l’objet de la convention ;
- les modalités d’application de la convention ;
- la durée ;
- la rémunération du compte courant d’associé, le cas échéant.
Il est également possible de prévoir des clauses spécifiques concernant les avances et leurs modalités, ou une clause de blocage par exemple.
Le versement par l’associé
Le plus souvent, l’apport en compte courant d’associé prend la forme d’un virement ou d’un dépôt de chèque émis par l’associé, sur compte bancaire de la société. Toutefois, il est également possible de réaliser cette opération suite à l'approbation des comptes. Ainsi, au lieu de puiser sur ses deniers personnels, l’associé réalise l’apport en compte courant d’associé à partir des dividendes qu’il aurait dû percevoir.
La rémunération de l’apport en compte courant d’associé
Enfin, lorsque vous réalisez un apport en compte courant en SARL ou dans toute autre type de société, la question de sa rémunération se pose. En effet, il est possible de prévoir l’application d’un taux d’intérêt, et donc le versement d’intérêts mensuels, trimestriels ou annuels à l’associé apporteur.
Toutefois, en l’absence de convention de compte courant d’associé prévoyant la rémunération de ce compte, l’apport en compte courant d’associé est réputé à titre gratuit.
Lorsqu’une rémunération est prévue, le taux d’intérêt est librement fixé par les associés dans les limites légales.
Quelle est la fiscalité d’un compte courant d’associé ?
Sur la plan fiscal, l’associé personne physique qui effectue l’apport en compte courant est imposé sur le montant brut des intérêts perçus. Ceux-ci sont soumis au Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) de 30 %. Si l’apport en compte courant d’associé est à titre gratuit, alors l’associé n’a aucune taxe ou impôt à régler.
Si l’associé est une personne morale soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), alors les intérêts perçus sont imposés en tant que produits financiers imposables. Si elle est soumise à l’impôt sur le revenu, les intérêts sont imposés au niveau des associés.
La société peut quant à elle déduire les intérêts versés à l’associé de son résultat, dès lors que ces derniers sont versés dans l’intérêt de la société et qu’ils sont inscrits dans son bilan comptable. La déductibilité est toutefois plafonnée selon des taux trimestriels fixés au journal officiel. De plus, pour que les intérêts versés par la société au titre de l’apport en courant soient déductibles, deux conditions doivent être réunies :
- le capital social doit être intégralement libéré ;
- le taux d’intérêt n’excède pas le taux brut avant imposition (taux de référence).
Comment comptabiliser un compte courant d’associé ?
Concernant l’apport en compte courant d’associé en comptabilité, il convient de passer les écritures suivantes :
- débit du compte 512 - Banque ;
- crédit du compte 4551 - Associés.
FAQ
Comment récupérer l'argent d'un compte courant d'associé ?
En principe, si le compte courant d’associé n’est pas bloqué, l’associé peut demander le remboursement de son apport en compte courant à tout moment dès lors que cela ne met pas en péril la stabilité financière de l’entreprise.
Pourquoi bloquer un compte courant d'associé ?
Prévoir une convention de compte courant d’associé qui contient une clause de blocage permet d’éviter que l’associé ne demande le remboursement du prêt à tout moment. Cela permet donc d’avoir une certaine stabilité financière, et de pouvoir prévoir la sortie de trésorerie le moment venu.
Est-ce obligatoire de rémunérer un compte courant d'associé ?
Non, ce n’est pas obligatoire de rémunérer un compte courant d’associé. D’ailleurs, par défaut, il est à titre gratuit. Il faut prévoir l’application d’un taux d’intérêt dans une convention de compte courant pour que celui-ci soit rémunéré.
Principales sources législatives et réglementaires :
- article 39 - Code général des impôts
- article 212 - Code général des impôts
- Bofip-Impôts n° BOI-BIC-CHG-50-50-30 sur les intérêts des avances consenties par les associés en sus de leur part de capital
Note du document :
4,5 - 27 vote(s)
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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